Les vignes de François Bitouzet-Prieur en Côte de Beaune

Interprète de la nature et manufacturier de produits de luxe, François, homme de conviction, propose des vins élégants et harmonieux qui raviront les initiés !

Déjà des enjeux

Le texte le plus ancien faisant référence à la vigne et au vin en Bourgogne date de l’an 312. Il s’agit d’un discours d’un nommé Eumène qui atteste de la présence de la vigne.

Au Xème siècle, l’aristocratie et les communautés religieuses étaient les propriétaires des vignobles. Les moines, qui ne cherchaient pas une rentabilité immédiate, ont œuvré avec le souci permanent d’atteindre la perfection (étude sur les meilleures souches, taille, prélèvement des boutures, greffages, méthodes de vinification, dégustations comparatives). Leur plus grande contribution au monde du vin est l’invention de la notion de climat. En créant les clos et la notion de climat, les moines ont donné aux vins de Bourgogne leur identité. La Bourgogne est redevable aux moines cisterciens de l’extraordinaire essor de son vignoble et notamment de ses deux cépages emblématiques, le pinot noir et le chardonnay.

Des vignes en héritage

Je rencontre François à Volnay, un des fiefs de la famille Bitouzet-Prieur. Le domaine Bitouzet-Prieur est situé sur la Côte de Beaune, essentiellement implanté sur les communes de Volnay et Meursault avec 13,55 hectares pour 17 cuvées dont 40 % en chardonnay et 60% en pinot noir, des vins mono-cépage qui leur confère une grande pureté d’expression.

Après sa formation au lycée viticole de Nîmes, François s’accorde en 2007 une escapade en Australie avant de prendre les rênes du domaine, aux commandes techniques dans un premier temps puis en tant que chef d’entreprise en 2012. C’est au début des années 1800 que l’histoire de la famille de François commence. Il représente la 6ème génération de vigneron.

A l’écoute de ses vignes

Sous un soleil radieux, François me propose d’aller sur la parcelle Taillepieds 1^er cru qui se situe en milieu de coteau. Entourée de vignes d’une esthétique parfaite, un moment de calme et de sérénité m’est offert. Pour commencer notre échange, François me décrit les particularités de cette parcelle qu’il affectionne particulièrement.
Pour comprendre comment intervient l’humain dans la construction d’un vin, François m’expose les différents paramètres à prendre en considération comme l’aspect scientifique, la date de récolte, le goût qui permettent d’avoir une impression sur le millésime mais aussi un contrôle sur les rendements, il souligne qu’une parcelle conserve son ADN et ce malgré les évolutions apportées.
Nous poursuivons sur une autre parcelle, toujours en rouge, le Clos des Chênes 1^er cru, François décrit l’ordre de récolte des parcelles qui dépend de son orientation, de la nature du sol et de son régime hydrique, dans un seul but: respecter le sens de la nature.

Pour guider sa prise de décisions, François se repose sur l’aspect scientifique, pendant la fermentation mais aussi le ressenti, qui donnent la tendance du millésime. A l’écoute de ses vignes car, sa seule règle c’est de pas en avoir. En perpétuel éveil,  François s’exerce tout le temps avec ses sens.

Respectueux de la nature, il pratique des vendanges manuelles et utilise depuis 2009 des produits dits de contact. Engagé dans une viticulture raisonnée, qui consiste à exclure l’usage des pesticides et autres polluants, François façonne des vins uniques tout en ayant une approche respectueuse de la vigne, du sol et du terroir car, le point de départ d’un grand vin est conditionné par la qualité du raisin lors de son arrivée dans la cuverie. Un soin particulier est apporté de la vinification jusqu’à la mise en bouteille. D’ailleurs, une cuverie à Volnay est dédiée aux rouges et une autre à Meursault pour les blancs. Il est également soucieux du confort de ses vendangeurs à qui il propose un logement.

Afin d’éviter la contrefaçon et garantir l’authenticité de sa production, François réfléchit à la possibilité d’avoir son propre moule de bouteille pour apposer la signature de son domaine. Il souligne l’importance de la traçabilité sur un marché mondial. Une proportion importante de sa production s’exporte aux Etats Unis, en Russie, au Japon et en Europe.

Profondément « terrien », François se présente à la fois comme un interprète de la nature et un manufacturier de produits de luxe et ce dans le respect du rythme de l’environnement végétal et animal. Son souhait est de conserver un équilibre entre sa passion et les faisceaux de contraintes inhérents à son activité de chef d’entreprise.

Place à la dégustation !

Pour aller au bout de sa démarche, François me propose de partager un déjeuner afin de d’apprécier les vins des deux parcelles visitées. Quelle belle surprise ! Nous commençons notre déjeuner avec un blanc Meursault 1^er cru Perrières 2011, assez serré, une belle longueur, vin persistant et poursuivons avec un  Taillepieds 1^er cru 2011 puis un Clos de Chênes 1^er cru 2011. Cette dégustation m’apprend à poser les mots qui traduisent la sensation en bouche, au nez et la vue. Le Taillepieds 1^er cru ne se dévoile pas tout de suite, il a une attaque austère mais délicate en fin de bouche alors que le Clos des Chênes 1^er cru est plus puissant. François propose de belles métaphores qui vous laissent rêveur et vous emmènent dans son voyage œnologique. La discussion se poursuit autour des enjeux financiers qui fluctuent en fonction de l’emplacement de la parcelle, car François veut conserver une ligne de conduite afin préserver les amateurs qui achètent son vin. Il me fait remarquer que le prix ne prend pas en considération la valeur travail ainsi que l’implication émotionnelle à chaque étape de l’élaboration d’un vin.

Animé par ses vignes et intarissable sur son sujet, François m’a proposé une parenthèse inattendue d’une grande richesse. Il se dit chanceux d’exercer dans ce domaine d’activité car avant d’être une carrière, c’est avant tout une passion. Défendre un terroir c’est aussi protéger un savoir-faire. Sa seule satisfaction, que son vin soit vecteur de plaisir ! 

Fort de ses convictions et en recherche constante d’excellence, François exerce son activité tout en conservant le recul nécessaire lui permettant une remise en question pour produire un vin harmonieux avec du charme et de la distinction. Il a su laisser libre cours à mes émotions olfactives et gustatives car nous possédons un référentiel qui nous est propre.
Malgré un rythme soutenu et intense, François pratique le triathlon, et réfléchi à ouvrir son champ d’action vers des vignobles en Savoie. Pour finir, je citerai François « le vin est un apprentissage du temps et si plus de passion plus de charbon… ».